Presse  25.10.21

Instagram, « Matchwithart » : une autre vision de l’art et de la mode

« Réunir l’Art et la Mode ». Voici l’objectif visé par l’initiatrice du compte Instagram Matchwithart. En accordant ses tenues vestimentaires à des œuvres d’art choisies, devant lesquelles elle se photographie de dos, la créatrice tient à « attirer notre regard » en proposant des images ludiques qui invitent le spectateur à se prêter au jeu de la comparaison. Passionnée par le monde artistique et souhaitant le rendre accessible à tous, elle se met en scène devant des œuvres de nombreux artistes tels que Claude Monet, Hans Hartung ou encore Sonia Delaunay, ainsi que devant de nombreuses toiles de Zao Wou-Ki, qu’elle affectionne tout particulièrement.

Sonia Delaunay-Pompidou. Prismes éclectiques, 1914. Courtesy Matchwithart

Comme elle l’explique dans une récente interview (16.08.2020), l’idée de réaliser ces images lui est venue lorsque, pendant une visite de galerie avec ses collègues, ces derniers lui font remarquer la ressemblance entre sa tenue et une œuvre exposée derrière elle. Intriguée par la réaction que ce match imprévu suscite, elle décide d’explorer cette voie et de mettre ce hasard au profit de sa passion pour l’art. Elle réalise ainsi plus de trois cent photographies qui soulignent les similitudes entre des œuvres d’art choisies et le vêtement de la spectatrice qui lui fait face ; des match volontaires, cette fois-ci, qui demandent un travail d’organisation et de recherche particulièrement exigeant.

Hans Hartung-Galerie Perrotin. T1982-H31, 1982. Courtesy Matchwithart

Que l’attention soit portée sur l’harmonie des tons comme c’est le cas pour le match avec la toile de Hans Hartung exposée à la Galerie Perrotin, sur l’accord des formes comme le montre la tenue choisie pour Prismes éclectiques de Sonia Delaunay, ou encore sur les détails des motifs représentés, dont la robe choisie pour Ciel de Zao Wou-Ki constitue un exemple frappant, ces photographies se révèlent autant poétiques que ludiques. Que notre regard soit attiré par le vêtement ou la toile, peu importe : pour la créatrice de Matchwithart, l’essentiel est d’attiser la curiosité du spectateur afin de l’encourager à se rendre dans les lieux culturels où sont exposées les œuvres qu’elle met en scène. Consciente que le monde de l’art et ses institutions peuvent sembler fermés à celui qui n’en fait pas partie, elle cherche à les « démystifier » et à les rendre accessibles à tous, un objectif que l’on retrouve également mis en œuvre dans ses légendes. En effet, elle relate dans ces dernières des anecdotes ou des informations biographiques sur l’artiste en simplifiant le vocabulaire utilisé, en proposant non pas une analyse fermée mais en suggérant des lectures possibles de l’œuvre. Une méthode pédagogique qui demande un travail de recherche important, mais qui se veut en accord avec le public hétérogène auquel elle s’adresse.

Zao Wouki-Hôtel de Caumont. 03.12.74, 1974. Courtesy Matchwithart

Zao Wouki-Hôtel de Caumont. Ciel, 2004. Courtesy Matchwithart

Si les réseaux sociaux constituent parfois un mode de communication contesté dans un monde artistique où la notion d’original s’accorde difficilement avec la reproduction numérique, la créatrice de Matchwithart a conscience de la portée qu’ils peuvent avoir auprès d’un public nouveau et, surtout, jeune. Sachant que le monde de l’art repose non seulement sur les collectionneurs et acheteurs, mais surtout sur la visibilité des artistes et de leurs œuvres, elle cherche à partager sa passion avec le plus grand nombre, avec pour objectif final d’inciter les gens à « pousser les portes » des lieux culturels. En se tenant devant les œuvres, elle met en abyme notre rôle de spectateur et permet de nous identifier à son regard : une démarche participative qui nous invite à reproduire ce geste de contemplation.

Helen Frankenthaler-Pompidou. Open Wall, 1953. Courtesy Matchwithart

En plus de présenter un grand intérêt artistique par le travail de la photographie qu’elle opère, autant sur le plan de la mise en scène, de la prise photographique ou du traitement de l’image, la créatrice du compte Matchwithart propose une méthode de médiation particulièrement attrayante. Par son objectif de rendre l’univers artistique « amusant » et « accessible à tous », elle répond à une tendance toujours plus grande de « démocratisation » et de « modernisation » qui prend place dans les institutions culturelles depuis plusieurs années déjà. Soutenue et suivie par de nombreux centres culturels (Centre Pompidou, Galerie Perrotin, Galerie Kamel Menour, etc.), elle semble alors réussir son pari : attirer autant un public de professionnels que d’amateurs d’histoire de l’art, de mode, d’images et de réseaux sociaux.

Zao Wouki-Hôtel de Caumont. Il ne fait jamais nuit, 2005. Courtesy Matchwithart

Pour visionner toutes les photographies de Matchwithart, rendez-vous sur son compte Instagram : https://www.instagram.com/matchwithart/