Presse 28.06.21 Exposition à l’Hôtel de Caumont, Aix-en-Provence
Blog The Gaze of a Parisienne, «Zao Wou-Ki, Il ne fait jamais nuit » par Caroline d’Esneval
Zao Wou-ki (1920-2013) est certainement l’un des artistes les plus importants du XXème siècle, mais aussi le plus énigmatique et fascinant. À travers son oeuvre magistrale se joue la rencontre de deux cultures très éloignées, celle de la Chine et de l’Occident. Trois ans après la brillante rétrospective au MAM de Paris (lire l’article), l’Hôtel de Caumont présente, à son tour, une magnifique exposition dédiée à l’artiste sino-français. La présentation, conçue en collaboration avec la Fondation Zao Wou-Ki, retrace le cheminement artistique du peintre depuis ses représentations figuratives jusqu’à l’abstraction, à travers 80 tableaux créés entre 1935 et 2009. Les très belles pièces exposées révèlent son captivant travail de la lumière, ses couleurs vibrantes, sa quête obsessionnelle de l’espace, la grâce infinie de son geste.
Zao Wou-Ki en 2000, devant 11.08.99 – Eclipse et le grand triptyque Hommage à mon ami Henri Michaux, photo Guillaume de Laubier
« Peindre, peindre
toujours peindre, encore peindre
Le mieux possible, le vide et le plein
le léger et le dense
le vivant et le souffle » Zao Wou-Ki
Zao Wou-Ki ,Il ne fait jamais nuit, 2005 Hôtel de Caumont, Aix en Provence
Ces quelques mots sonnent comme le début d’un poème. La suite pourrait être « ..sous le soleil de Cézanne », comme le suggère Dominique de Villepin dans sa préface du catalogue de l’exposition. Depuis ses débuts et toute sa vie durant, Zao Wou-Ki a été fasciné par la peinture de Cézanne. Il aime la force de l’expression formelle du précurseur du cubisme mais aussi ses couleurs, et surtout la lumière chatoyante du Sud de la France qui habite ses tableaux. Comme lui, le peintre chinois succombe à la beauté si particulière du soleil des côtes méditerranéennes. Il installera un atelier dans le Var en 1958, avant d’en faire construire un autre à Ibiza par son ami l’architecte Josep Lluis Sert. Il ne fait jamais nuit, est le titre d’un grand diptyque de Zao Wou-Ki, aux couleurs vibrantes, illuminant la nature de toutes les nuances du soleil.
De la figuration à l’abstraction
Zao Wou-Ki, Juillet-Octobre 1997, photo©thegazeofaparisienne
L’accrochage chronologique très clair parcourt toute la vie artistique du grand maître. Ses débuts figuratifs ancrés dans ses études des Beaux Arts en Chine, mais déjà inspirés par les grands peintres de l’école de Paris. Arrivé dans la capitale Française en 1948, Zao Wou-ki réalise des oeuvres très poétiques sous des lumières de jour et de nuit. De plus en plus, l’artiste cherche à s’éloigner de ses apprentissages Chinois et à trouver sa propre voie vers un art plus libre. Un Art, qui, affranchi de la représentation de sujets extérieurs, serait l’expression de son monde intérieur, de ses émotions, des tumultes et vibrations de son âme. Au début des années 50, la découverte de l’oeuvre de Paul Klee, exposée à Berne, lui donne le déclic pour s’extraire de la figuration, par l’utilisation les signes.
A la fin des années 50, Zao Wou-ki fait un grand voyage avec son ami Pierre Soulage en Asie et aux Etats-Unis. Là, il découvre l’expressionnisme Américain qui lui ouvre de nouvelles perspectives. A son retour il se lance dans des oeuvres totalement abstraites, libres; un art informel fait de jaillissements, de mouvements, d’énergie.
L’exposition à l’Hôtel de Caumont d’Aix-en-Provence présente de magnifiques peintures de l’artiste, inspirées par la lumière méditerranéenne et les mouvements de la mer.
Zao Wou-Ki, Aquarelles , Photo©thegazeofaparisienne
Délaissée par Zao wou-ki à son arrivée à Paris, par peur d’être catalogué comme peintre Chinois, la pratique de l’encre revient dans l’expression artistique du peintre à partir du début des années 70. Celui-ci vient de perdre sa femme May . Très atteint, il n’arrive plus à peindre. Sur les conseils de son ami Henri Michaux, il renoue avec l’encre. Le geste lui revient instinctivement. Tout ce pan de son oeuvre apparait comme un pont unissant le savoir-faire traditionnel Chinois, présent au plus profond de lui, et son geste abstrait qui en réinvente le genre…. gracieuses, subtiles, mystérieuses, envoûtantes sont les Encres de Zao Wou-Ki!
A partir de 2004, Zao Wou-ki passe beaucoup de temps dans la propriété du couturier Emmanuel Ungaro dans le Luberon. Là il inaugure la reprétentation de « motifs » dans des aquarelles colorées, lumineuses, inspirées par la nature et la lumière du sud de la France.
Une magnifique exposition du grand Maître – brillamment orchestrée par Yann Hendgen, Directeur artistique de la Fondation Zao Wou-ki et Erik Verhagen, Professeur en Histoire de l’art contemporain à l’université polytechnique de Valenciennes. A voir absolument si vous passez en Provence.
Caroline d’Esneval
Hôtel de Caumont – Centre d’Art
3 rue Joseph Cabassol
Aix-en-Provence
Jusqu’au 10 Octobre 2021